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L’action de l’encadrement dans le développement de la santé des équipes/la qualité du service public

Article publié dans la Revue ANACT « Les transformations du travail dans la Fonction Publique »


Annie Debard, docteure en psychologie du travail et des organisations, consultante à Côté Travail spécialisé dans le développement de la qualité de vie au travail.

Christine Faure Patras, psychologue du travail et des organisations, intervenante en développement professionnel et santé au travail.

Carole Charras, psycho sociologue, intervenante en santé au travail et consultante en développement professionnel.

Philippe Sarnin, professeur des universités en psychologie du travail et des organisations, Institut de psychologie, Laboratoire GRePS, Université Lumière Lyon 2.

Résumé

Dans les contextes de changements organisationnels nombreux affectant la Fonction Publique, la question de maintenir, voire développer la santé des équipes est une préoccupation majeure. Dans les phases de transition, l’activité de l’encadrement demande à être plus particulièrement soutenue.

En nous appuyant sur les dernières recherches en matière de santé au travail et du rôle rempli par le management, nous rendons compte d’une recherche action menée dans un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes en restructuration. L’apprentissage à la discussion centrée sur le travail a permis d’accompagner le processus de changement organisationnel en développant la santé des équipes, les compétences de l’encadrement et la qualité de prise en charge des résidents.

Mots clés : santé au travail, management, espaces de discussion, collectifs de travail, métier, changement organisationnel

Dans un contexte de réforme du service public et une recherche accrue de baisse des déficits, la Fonction Publique connait depuis plus d’une décennie des transformations structurelles qui viennent bousculer de plein fouet les métiers des fonctionnaires. Si les effets économiques de ces réformes sont à démontrer, le constat d’une dégradation de la santé est réel (Clot, 2010) La volonté de moderniser en adoptant des outils managériaux provenant des entreprises privées a conduit à des pertes de repères et un sentiment d’éloignement des valeurs fondamentales du service public. Aujourd’hui, la question de préserver la santé des agents dans des contextes de changements organisationnels est centrale (Gaulejac, 2011).

Parallèlement aux réformes menées dans la fonction publique, des rapports ont été publiés et ont fait avancer les recherches se proposant de concilier bien-être au travail et performance. Le rapport Lachmann, Larose et Penicaud (2010), émet des préconisations de ce type. L’une d’entre elles place le manager comme un acteur majeur de la santé au travail. Plusieurs études ont démontré le lien entre la santé des salariés et les compétences, comportements des encadrants (Morin & Chere, 1999 ; Journoud & Pezé, 2012). Si nous partageons cette affirmation, la question du comment surgit aussitôt.

Notre article souhaite interroger la place de l’encadrement dans un contexte de changement organisationnel en formulant une question : comment soutenir l’action des encadrants pour promouvoir la santé au travail ? Nous nous appuierons sur les dernières recherches pour préconiser la « discussion sur le travail » comme outil managérial permettant le développement de la santé des équipes et la performance d’une organisation. Ensuite, nous déclinerons très concrètement les modalités de mise en œuvre à partir d’une recherche-action que nous avons menée dans un EHPAD en restructuration en butte à une injonction de retour à l’équilibre budgétaire.

1 – La problématique

Notre recherche-action a été articulée sur la base des travaux de deux chercheurs issus de disciplines différentes en sciences sociales. D’un côté, Yves Clot, psychologue du travail, invite les organisations à mettre en débat le travail et à « réhabiliter la dispute professionnelle » pour développer la santé au travail (Clot, 2008, 2010, 2014). Mathieu Detchesshar, quant à lui, remet en avant la place « essentielle et vitale » de l’encadrement auprès des équipes (Detchessahar, 2013).

La clinique du travail préconise de prendre soin du travail pour développer la santé des individus, des collectifs de travail et des organisations. Or, le travail est une énigme même pour celui qui le réalise (Davezies, 2012). Il nous confronte au réel et nous demande une adaptation constante en partage avec les autres. Le travail est également traversé par de la conflictualité. Nous travaillons avec et pour les autres, ce qui exige des ajustements sur le « comment faire le travail ». Et c’est dans la confrontation des points de vue (et non son évitement qui conduit à entretenir les risques psychosociaux) que va se développer la santé. D’après Clot (2014, p. .10), l’existence de points de vue différents « non seulement n’est pas un drame, mais elle peut d’abord être source de développement de l’efficacité et de la santé au travail. » Par conséquent, la conflictualité inhérente au travail ne doit pas être conçue comme une impasse mais une opportunité pour le développement du pouvoir d’agir des professionnels qui est source et objectif de la santé au travail. C’est donc par le dialogue, la controverse, la dispute professionnelle que la vitalité d’un collectif de travail, soutenue par son encadrement, va permettre le développement d’une organisation saine.

Dans le champ de la gestion, Mathieu Detchessahar s’appuie sur les résultats de l’enquête SORG pour réhabiliter la place de l’encadrement auprès des équipes (2013). Cette enquête démontre que les cadres sont happés par des activités éloignées du travail de leurs équipes : c’est le cas avec le reporting qui évalue le prescrit sans écouter le réel des situations de travail, et les réunions qui transforment les encadrants en « manager hors sol ». « Rendez-nous nos cadres », véritable cri d’alarme lancé par les professionnels contre toutes attentes dans un contexte de risques professionnels où le harcèlement se pense du côté du management. Ce chercheur rejoint les travaux de Clot en proposant de remettre sur le devant de la scène du travail : un management par la discussion (Detchessahar, 2013, p.58).

Ces deux courants des sciences sociales se rejoignent en plaçant le travail au centre des préoccupations pour conjuguer santé et qualité de vie du travail ainsi que performance globale.

La santé étant notre fil conducteur, nous devons préciser quelle « santé » nous défendons. Pierre Roche (2014) s’appuie sur des philosophes (Canguilhem, Nietzsche et Spinoza) pour parler de santé vivante au-delà de la définition de l’OMS de 1946 « un état de bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Cette définition est limitative et peut réduire les actions en santé au travail en se centrant sur l’individu dans un souci de protection et/ou de réparation (ces actions sont qualifiées « d’hygiénistes » par Clot, 2010). Pour P. Roche, la santé se construit dans un processus qui vise à mettre en question les normes prescrites dans un cadre contraint. Or, c’est en se confrontant au réel du travail que l’individu est poussé à la créativité et au développement d’une santé qui se construit dans l’établissement d’une nouvelle normativité (création d’actions pour s’adapter aux contraintes) et non pas dans la passivité et l’acceptation de la norme. Le pouvoir d’agir devient alors un ingrédient central de la santé au travail et c’est ce pouvoir d’agir qui doit être soutenu par l’action managériale. A cette définition, nous rappelons que le travail, outre le « faire » est du « faire ensemble ». Aussi, le processus qui aboutit à une santé vivante se construit (ou se déconstruit) dans le cadre des relations entre les professionnels. La qualité des relations professionnelles devient un élément essentiel de la santé vivante : « C’est dire que la construction de la santé, dans une telle perspective, requiert la construction de rapports sociaux à l’intérieur desquels les individus s’affectent mutuellement d’une façon positive et non négative. » (Roche, 2014, p. 6).

Ainsi, l’action managériale soutenant la santé doit conjointement se préoccuper de la qualité du travail tout en veillant à la qualité des relations et à la communication au sein des équipes.

A ces postulats, nous en rajoutons un dernier : débattre et se disputer collectivement sur le travail ne va pas de soi. Cela demande également du temps et un temps dédié spécifiquement à cette activité. Davezies, nous rappelle ce que l’acte langagier nécessite pour avoir une action positive sur la santé :

« Pour que le conflit se développe sous la forme d’un débat susceptible de produire une évolution positive, il faudrait que le salarié puisse revenir sur son activité afin d‘expliciter les enjeux qui ne sont pas perceptibles à partir de la position du chef, mais sont néanmoins pertinents au regard de son expérience professionnelle. (…) Or, il ne dispose ni des temps, ni des espaces de discussion nécessaires à son élaboration. » (Davezies, 2012, p. 14).

Ce temps et ces espaces de discussion centrés sur « la dispute professionnelle » entre les différents acteurs, dont l’encadrement de proximité, nous les avons mis en place dans le cadre d’une recherche-action. Celle-ci s’est déroulée dans un Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) d’un centre hospitalier de la Fonction publique Hospitalière.

Cet EHPAD, de 403 lits, est divisé en 11 unités. A notre arrivée, l’encadrement se compose de 6 cadres et 1 cadre supérieure de santé. Notre intervention a également inclus le service de bionettoyage (1 cadre et 2 encadrantes de proximité). Au total, 237 professionnels (dont l’encadrement) et 5 médecins ont participé à l’action.

2 – Les éléments de notre recherche action dans un EHPAD

Les établissements de santé ont connu, ces dernières années, de nombreuses transformations liées aux réformes ministérielles (2002, décret relatif au temps de travail ; 2007, réforme hospitalière avec une tarification de l’activité (T2A) ; 2009, loi Hôpital Patient Santé et Territoires). Ces différentes réformes imposent à l’hôpital une maîtrise des ressources utilisées par les établissements de santé dans un contexte plus général de contingentement fort des dépenses publiques. Cet objectif de baisse de la dépense est régulièrement contrôlé par les tutelles que sont les Agences Régionales de Santé (ARS) et la Haute Autorité de Santé (HAS), entre autres acteurs dits « tutélaires ». Des contrats de retour à l’équilibre sont régulièrement négociés entre ces tutelles et les établissements de santé en difficultés.

Dans un contexte économique difficile, le secteur gérontologique de cet établissement a répondu à l’injonction de l’ARS (Agence Régionale de Santé) en mettant en place un « Plan de retour à l’équilibre budgétaire ». Ainsi, la direction de l’établissement a mis en place des mesures qui ont affecté le personnel. Celui-ci a été réduit de 10 % et, avant notre arrivée, l’organisation du travail et les métiers ont été repensés : redéfinition des tâches, création de métiers : agents de bio nettoyage et agents hôteliers. L’ensemble des métiers de soins a été affecté non seulement par la réduction des effectifs mais aussi par la redéfinition des métiers. Notre accompagnement avait pour objectif de préserver (voire développer) la santé des agents dans un contexte de changements organisationnels et relationnels.

Au démarrage de l’intervention, nous connaissions l’établissement de santé auprès duquel nous avions déployé des actions de sensibilisations sur « les risques psychosociaux et la qualité de vie au travail ». Nous avions accompagné les acteurs (direction, partenaires sociaux et encadrements) dans une évolution de leurs représentations afin qu’ils envisagent la prévention de la qualité du travail au-delà du risque psychosocial (et de la personnification des risques). Nos intentions et nos objectifs visaient à instaurer des processus afin de soutenir l’action des encadrants en santé au travail. Ceux-ci ont pris en considération l’état de la recherche sur les liens entre santé et travail. Aussi, nous sommes partis de postulats issus de la littérature :

- La discussion sur le travail produit de la santé (Davezies, 2012 ; Clot, 2014 ; Roche, 2014).

- La discussion sur le travail demande un apprentissage individuel, collectif et organisationnel (Detchessahar, 2013).

Notre objectif central était de développer des compétences individuelles, collectives et organisationnelles à la discussion du travail. Pour cela, il était nécessaire « d’outiller » les acteurs pour soutenir des disputes professionnelles entre pairs, avec son encadrement et, à un niveau plus politique, au niveau du dialogue social. Plus particulièrement, nous souhaitions permettre l’apprentissage à la discussion sur le travail auprès de ces acteurs centraux que sont les cadres (Sarnin et Debard, 2008). Ces cadres de santé se sentent bien souvent pris « entre le marteau et l’enclume » et il nous est apparu tout au long de l’intervention important de développer ces espaces de discussion et cet apprentissage aussi bien auprès des cadres de santé avec leurs équipes, que les cadres de santé avec leur Direction (Direction, Direction des soins et DRH). Ces changements viennent également affecter la qualité du dialogue social sur le travail. Aussi, nous avons veillé à développer ces mêmes compétences dans des espaces de discussion réunissant les acteurs de terrain, les encadrants, les directions et les partenaires sociaux.

En nous appuyant sur les travaux de Detchessahar (ibid.), nous avons bâti un « écosystème » de la discussion sur le travail. En effet, la discussion sur le travail peut avoir une fonction politique en ce sens où elle introduit dans la chaine de décision des éléments de sagesse, de savoir-faire, de « gros bon sens » (Morin, 2010). Elle induit des recherches collectives de solutions produisant des règles à un niveau local (au niveau de l’équipe), global (stratégie de l’entreprise) et méso (lieu de discussions intermédiaires entre les équipes et les encadrants, mais aussi entre les encadrants et leur direction).

« Il faut avoir un espace de discussion avec la direction parce que le « non » collectif ce n’est pas le même que le « non » individuel ». (cadre de santé lors du dernier comité de pilotage)

L’écosystème de la discussion du travail nécessite une organisation qui vise à dépasser les résistances à discuter du travail et également à s’installer durablement cette discussion dans les organisations. Pour répondre à ces enjeux, nous avons cherché d’une part à impliquer l’ensemble des acteurs dans l’ensemble du processus et, d’autre part, à construire des espaces de discussion à différents niveaux politiques de l’organisation (Sarnin et coll., 2012).

Nous avons ainsi interconnecté 3 espaces de discussion :

1. Un niveau local

Le démarrage de notre intervention a consisté à mettre en place des espaces de discussion entre professionnels d’un même métier. Animés par une intervenante, ces espaces ont permis de recueillir les « objets » de travail en tension. Les professionnels ont mis en discussion, entre eux, leurs préoccupations à réaliser du « bon travail ». Afin de ne pas ancrer des stratégies défensives de métier, nous avons interconnecté ce niveau local avec le niveau méso.

2. Un niveau méso

Les objets en tension dans le travail ont été mis en discussion entre les encadrants et leurs équipes (réunissant plusieurs métiers comme aides-soignants, infirmiers, agents hôteliers). Des solutions concrètes et pragmatiques ont été construites et mises en place dans les équipes avec le soutien de l’encadrement. Ces espaces « mezzo » ont été coanimés par les intervenantes et les encadrants après un temps de préparation et de partages de compétences notamment sur les techniques d’animation, le processus de décision avec les équipes et le cadre relationnel entre les participants.

3. Un niveau global

Notre niveau global a été le lieu où les liens entre la stratégie de l’établissement et les objectifs de l’intervention ont été partagés, complétés, coconstruits. Ces espaces réunissaient les représentants de la direction (dont la directrice), les partenaires sociaux, des professionnels des différents métiers de l’EHPAD, l’encadrement et les acteurs du service médico-social.

L’intervention s’est déroulée sur 18 mois. Nous avons schématisé le processus sachant que des réunions de comité de pilotage (niveau global) sont venus rythmer la démarche à raison d’une séance par trimestre environ.


Figure 1 : Processus de l’ingénierie des espaces de discussion par niveau

3 - Les résultats de l’intervention

Lors de nos séances de travail, des situations diverses de tensions du travail à réguler sont apparues. Ces situations de tensions ont constitué nos « objets de discussion ». Nous l’avons dit : débattre du travail ne va pas de soi. Si l’encadrement est habile à « organiser l’organisation du travail », organiser la « Dispute » autour d’une situation qui fait conflit est moins aisé. Ce sont des compétences de médiation du travail par le travail (à partir de situations réelles) qui sont à développer à partir de l’expérience d’espaces de discussion sur le travail. « L’espace de discussion est le médium à travers lequel se réalise l’ensemble des arrangements, compromis et bricolage que supposent l’incomplétude de la prescription et le caractère irréductiblement erratique de l’activité concrète » (Detchessahar, 2013, p. 59). Plusieurs situations de tension ont été choisies par les équipes et les cadres pour trouver des solutions qui répondent collectivement à la question du « bon travail », facteur du développement de la santé : la gestion des absences (faire revenir un professionnel sur son temps de repos), les soins pédicures pour des personnes âgées avec le risque de blesser et plus particulièrement les diabétiques, la gestion des résidents violents, l’organisation des toilettes avec le souci de l’équité… D’autres thèmes de discussion plus transversaux ont émergé : la coopération entre les métiers, les règles d’écoute et de partage d’informations, l’intégration des nouveaux professionnels, l’organisation du travail entre aides-soignants et agents bionettoyages…

Pour chacun d’entre eux, ont été mises en place des méthodologies d’animation de groupe adaptées aux niveaux de discussion et aux objets discutés.

Pour autant, engager ce processus nous a permis de faire face à la culture organisationnelle sous-jacente de cet établissement. Dans celle-ci un certain nombre de « résistances » à débattre du travail sont apparues :

- Si un compte rendu est fait, il est inutile d’assister à une réunion.

- Si un professionnel d’un grade ou d’un diplôme supérieur parle, ça ne se discute pas.

Or, non seulement la discussion était un enjeu dans notre intervention, mais ces différents signaux d’alerte manifestant une résistance « culturelle » à la discussion nous ont incités à créer une nouvelle méthodologie d’animation de nos comités de pilotage afin d’en faire des espaces d’apprentissage collectif et organisationnel à la discussion. Nous avons choisi de passer par l’expérience et de faire vivre à nos interlocuteurs le débat sur le travail. Pour cala, nous avons mis en scène notre intervention. Et, à l’aide d’un tiers (Philippe Sarnin, Professeur de l’Université Lyon 2), nous avons débattu des tensions liées à notre accompagnement afin de les dénouer et trouver collectivement des solutions pour faire du « bon travail » dans cette intervention. Les effets de cette expérience ont été pérennes. Les réunions instituées se sont modifiées en intégrant un espace de débat hors ordre du jour.

« Notre cadre, elle prend le temps de s’asseoir avec nous. Elle ne pose pas le planning et elle part. Elle est à l’écoute. Dès qu’on pose un problème, elle cherche à nous arranger. Lorsqu’il y a un problème, elle fait une réunion et elle demande l’avis de tous. Après, elle décide et c’est en fonction du confort du résident. » (propos d’une professionnelle)

En termes d’apprentissage, nous restituons les propos de la directrice des soins lors d’un comité de pilotage :

« Ce que j’ai trouvé intéressant dans les retours, c’est que les agents évoquent ce besoin de communiquer, d’échanger entre eux. Alors je me dis que cette réorganisation, le projet la brossait dans les grandes lignes et orientations. Inévitablement, il y avait des points qui allaient heurter et dysfonctionner, et l’idée c’est de rendre les professionnels acteurs et c’est aussi notre principale préoccupation. Finalement, ces points de dysfonctionnements, c’est l’outil à utiliser pour faire parler autour de leurs préoccupations, mais du quotidien, ce qui leur pose vraiment un problème, de situations où ils ont eu des difficultés. OK, ça s’est passé comme ça. On va voir comment le résoudre autour de la table et ça se fait en inter-métiers. C’est l’essence même de ce projet. Moi ce que j’ai entendu, c’est que les agents veulent discuter entre eux. Il y a des tensions et des choses à revoir. Et c’est un véritable outil de management pour l’encadrement me semble-t-il. » (Extrait comité de pilotage)

Cet extrait représente ce que nous avons pu observer dans les espaces de discussion, et ce à tous les niveaux, c’est-à-dire des postures et des mises en débat différentes qui permettent d’échanger sur autre chose que les objectifs, soit sur le réel du travail. Dans cet extrait, nous pouvons également observer un « déplacement » du regard :

« Par rapport à ce que vous disiez tout à l’heure sur les métiers… Le métier, il est le métier. Mais il se décline de façon très différente suivant où on est. Et ça vous l’avez très bien perçu. Et ça moi, j’en suis convaincue parce que rien qu’au niveau de mon site, il y a trois étages. Je suis aide-soignante et mon travail, je le fais de la même façon, mais j’ai une façon de faire différente en fonction des étages. Je suis aide-soignante sur mon site mais je ne suis pas la même au premier au deuxième, etc. » (Propos d’une aide-soignante et membre du CHSCT)

Pour permettre cette différence de mode d’échanges, et parvenir à des changements de postures individuelles et collectives, une attention forte a été portée sur la qualité des relations entre les intervenantes et les professionnels, la convivialité des rencontres et les règles de fonctionnement.

Nous avons veillé à faire de nos interventions des moments agréables et engageants : recevoir les groupes avec des boissons, prévoir des moyens pour se restaurer selon les horaires de nos interventions, aider à préciser les sujets sensibles, être en somme attentives, voire attentionnées. Nous sommes allées sur le terrain au démarrage de l’action pour accompagner les agents et mieux comprendre le travail et le métier. Développer une confiance entre les intervenantes et les groupes de travail a conduit progressivement à la possibilité de sortir des habitudes de fonctionnement, pour oser dire ou faire ce qui n’était pas dans les « codes » antérieurs (manière d’animer, ce qui est convenu de dire ou pas…). Ainsi un cadre qui était en retrait dans les coanimations avec ses équipes est progressivement devenu plus actif, voire co-créatif dans la manière de débattre sur le travail avec ses équipes. Non satisfait de l’engagement de ses équipes lors d’une séance de travail, il a souhaité, lors de la séance suivante, animer l’espace de débat avec une méthodologie plus exposante : « jouer » des scènes de vie au travail sur un des sujets en tension (faire revenir un agent pendant ses jours de congés pour assurer la continuité de service). Ceci a représenté un engagement fort, pour lui, pour les membres de son équipe, pour l’intervenante. Mais cette séance a été particulièrement intéressante. Des situations problèmes indicibles et invisibles jusqu’alors ont pu être évoquées avec le cadre et être débattu sur les solutions possibles. C’est un exemple de ce qui a été possible après un travail individuel et collectif de plusieurs mois avec les cadres de santé et leurs équipes.

Cette création « d’alliances » (à tous les niveaux, avec les métiers, binôme intervenante-cadre, au niveau global) semble aussi avoir contribué au renfort de la confiance, de l’espoir pour consolider et étayer ces transitions. Nous avons vu aussi l’équipe des cadres passer d’une posture collectivement observatrice (peu d’interventions au début des séances qui leur étaient destinées), à une posture engagée et proactive (faire des demandes, être plus sollicitant auprès de leur hiérarchie, voire auprès des intervenantes pour demander des séances spécifiques pour leurs métiers).

Notre deuxième hypothèse établissait un lien positif entre l’apprentissage collectif à la discussion et la santé des équipes (encadrement compris). Nous nous sommes donc questionnés : qu’est-ce qu’ont produit les espaces de discussion en termes de santé ?

4 – Evaluation de l’action

Dès le début, nous avions prévu d’évaluer l’action en termes d’impacts sur la santé. Aussi, nous avions proposé un questionnaire qualité de vie aux 240 professionnels de cet EHPAD au démarrage de l’intervention. Nous avons proposé le même questionnaire 18 mois après, avec un taux de retour similaire d’environ 60 %. Les résultats ci-dessous montrent l’évolution de la satisfaction des professionnels sur les items mesurant la santé :

Avant intervention

Après intervention

La possibilité de prendre des décisions de ma propre initiative dans le cadre de mes fonctions

36 %

47 %

La créativité dans la réalisation de mon travail

16 %

37 %

La façon dont mon travail est respecté

16 %

32 %

L’ambiance de travail dans mon service

47 %

67 %

Mes relations avec les personnes avec qui je travaille

56 %

70 %

Les temps d’échange sur le travail avec mes collègues

29 %

40 %

La manière dont mon hiérarchique prend en compte les propositions de l’équipe

21 %

44 %

La manière dont mon hiérarchique anime et motive son équipe

18 %

40 %

Le soutien au quotidien reçu de la part de ma hiérarchie en cas de difficulté

21 %

40 %

Mon supérieur prend en compte mon opinion

11 %

30 %

L’aide que je peux apporter aux patients

38 %

51 %

Tableau 2 : Résultats du questionnaire de satisfaction

Observer ce tableau et ces résultats pourrait laisser l’impression d’une vision idyllique de cette recherche-action. Pour autant, nous avons pu constater, au-delà du temps que demandent ces interventions, plusieurs limites.

Premièrement, l’apprentissage à la discussion et la mise en place d’espace de discussion n’est pas toujours possible dans des contextes de tensions relationnelles graves dans une équipe. Une action visant l’apaisement des conflits ou l’arbitrage des conflits est nécessaire dans un premier temps. En revanche, pour accompagner les équipes à retrouver des modes de coopération, choisir des objets de discussion centrés sur le travail permet de revenir à des modes relationnels plus sains.

Deuxièmement, le turn-over structurel des cadres dans la Fonction Publique Hospitalière interroge la pérennité des effets de cette intervention. Moins de deux ans après notre intervention, seuls 2 cadres sur les 9 que nous avons accompagnés sont toujours présents auprès des équipes. Qu’ont-ils transmis à leurs nouveaux collègues ? Comment la Direction des soins et la cadre supérieure ont-elles pu transmettre cette « culture » du débat auprès des nouveaux cadres de santé ? Cette nouvelle compétence a-t-elle été recherchée dans les recrutements et développée ? Autant de questions qui restent en suspens et qui pourraient être l’objet d’une nouvelle évaluation.

Nous avons aussi constaté que l'apprentissage à la discussion est long aussi bien pour les individus que le collectif de travail, mais aussi pour les acteurs institutionnels. Nous sommes même en droit de poser la question suivante : en finit-ont un jour d’apprendre à discuter du travail et à se disputer professionnellement ?

Conclusion

L’évaluation de notre intervention menée dans la partie 4 démontre que « manager par la discussion » produit des effets positifs sur la santé en termes de développement du pouvoir d’agir. Toutefois, nous devons convenir que des compétences doivent être acquises par les encadrants.

Nous pensons que cet « art » comprend, de notre point de vue, trois types de connaissances :

- La connaissance des processus : parler de son métier demande un apprentissage à la discussion. L’encadrant doit prendre en compte la temporalité que demande tout apprentissage. Il est variable selon la vitalité du collectif de travail.

- La connaissance d’outils pour interroger le métier : bien que l’objectif de la discussion soit une prise de décision ou un objectif de production de solutions concrètes, c’est la capacité du cadre à mettre en interrogation les évidences du métier de ses équipes qui permet de transformer le travail. Acquérir des techniques d’animation, faire respecter un cadre relationnel et arbitrer sont des outils nécessaires pour interroger le métier en sécurité.

- La connaissance du… reste. Nous voudrions citer cette scène entre deux encadrants l’un confirmé et l’autre novice. Le premier apprenait au deuxième à faire des plannings lorsqu’il a poussé la feuille vers son collègue en lui disant : « Et le reste t’appartient ». Le reste appartient au cadre. Pour connaitre ce « reste », il lui faut s’intéresser à ses équipes, connaître les rituels, saisir les subtilités relationnelles.

C’est « l’art d’interroger le métier » qui doit être construit avec les encadrants.

Bibliographie

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Christine Faure Patras, psychologue du travail et des organisations, intervenante en développement professionnel et santé au travail.

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Philippe Sarnin, professeur des universités en psychologie du travail et des organisations, Institut de psychologie, Laboratoire GRePS, Université Lumière Lyon 2.

Résumé

Dans les contextes de changements organisationnels nombreux affectant la Fonction Publique, la question de maintenir, voire développer la santé des équipes est une préoccupation majeure. Dans les phases de transition, l’activité de l’encadrement demande à être plus particulièrement soutenue.

En nous appuyant sur les dernières recherches en matière de santé au travail et du rôle rempli par le management, nous rendons compte d’une recherche action menée dans un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes en restructuration. L’apprentissage à la discussion centrée sur le travail a permis d’accompagner le processus de changement organisationnel en développant la santé des équipes, les compétences de l’encadrement et la qualité de prise en charge des résidents.

Mots clés : santé au travail, management, espaces de discussion, collectifs de travail, métier, changement organisationnel

Dans un contexte de réforme du service public et une recherche accrue de baisse des déficits, la Fonction Publique connait depuis plus d’une décennie des transformations structurelles qui viennent bousculer de plein fouet les métiers des fonctionnaires. Si les effets économiques de ces réformes sont à démontrer, le constat d’une dégradation de la santé est réel (Clot, 2010) La volonté de moderniser en adoptant des outils managériaux provenant des entreprises privées a conduit à des pertes de repères et un sentiment d’éloignement des valeurs fondamentales du service public. Aujourd’hui, la question de préserver la santé des agents dans des contextes de changements organisationnels est centrale (Gaulejac, 2011).

Parallèlement aux réformes menées dans la fonction publique, des rapports ont été publiés et ont fait avancer les recherches se proposant de concilier bien-être au travail et performance. Le rapport Lachmann, Larose et Penicaud (2010), émet des préconisations de ce type. L’une d’entre elles place le manager comme un acteur majeur de la santé au travail. Plusieurs études ont démontré le lien entre la santé des salariés et les compétences, comportements des encadrants (Morin & Chere, 1999 ; Journoud & Pezé, 2012). Si nous partageons cette affirmation, la question du comment surgit aussitôt.

Notre article souhaite interroger la place de l’encadrement dans un contexte de changement organisationnel en formulant une question : comment soutenir l’action des encadrants pour promouvoir la santé au travail ? Nous nous appuierons sur les dernières recherches pour préconiser la « discussion sur le travail » comme outil managérial permettant le développement de la santé des équipes et la performance d’une organisation. Ensuite, nous déclinerons très concrètement les modalités de mise en œuvre à partir d’une recherche-action que nous avons menée dans un EHPAD en restructuration en butte à une injonction de retour à l’équilibre budgétaire.

1 – La problématique

Notre recherche-action a été articulée sur la base des travaux de deux chercheurs issus de disciplines différentes en sciences sociales. D’un côté, Yves Clot, psychologue du travail, invite les organisations à mettre en débat le travail et à « réhabiliter la dispute professionnelle » pour développer la santé au travail (Clot, 2008, 2010, 2014). Mathieu Detchesshar, quant à lui, remet en avant la place « essentielle et vitale » de l’encadrement auprès des équipes (Detchessahar, 2013).

La clinique du travail préconise de prendre soin du travail pour développer la santé des individus, des collectifs de travail et des organisations. Or, le travail est une énigme même pour celui qui le réalise (Davezies, 2012). Il nous confronte au réel et nous demande une adaptation constante en partage avec les autres. Le travail est également traversé par de la conflictualité. Nous travaillons avec et pour les autres, ce qui exige des ajustements sur le « comment faire le travail ». Et c’est dans la confrontation des points de vue (et non son évitement qui conduit à entretenir les risques psychosociaux) que va se développer la santé. D’après Clot (2014, p. .10), l’existence de points de vue différents « non seulement n’est pas un drame, mais elle peut d’abord être source de développement de l’efficacité et de la santé au travail. » Par conséquent, la conflictualité inhérente au travail ne doit pas être conçue comme une impasse mais une opportunité pour le développement du pouvoir d’agir des professionnels qui est source et objectif de la santé au travail. C’est donc par le dialogue, la controverse, la dispute professionnelle que la vitalité d’un collectif de travail, soutenue par son encadrement, va permettre le développement d’une organisation saine.

Dans le champ de la gestion, Mathieu Detchessahar s’appuie sur les résultats de l’enquête SORG pour réhabiliter la place de l’encadrement auprès des équipes (2013). Cette enquête démontre que les cadres sont happés par des activités éloignées du travail de leurs équipes : c’est le cas avec le reporting qui évalue le prescrit sans écouter le réel des situations de travail, et les réunions qui transforment les encadrants en « manager hors sol ». « Rendez-nous nos cadres », véritable cri d’alarme lancé par les professionnels contre toutes attentes dans un contexte de risques professionnels où le harcèlement se pense du côté du management. Ce chercheur rejoint les travaux de Clot en proposant de remettre sur le devant de la scène du travail : un management par la discussion (Detchessahar, 2013, p.58).

Ces deux courants des sciences sociales se rejoignent en plaçant le travail au centre des préoccupations pour conjuguer santé et qualité de vie du travail ainsi que performance globale.

La santé étant notre fil conducteur, nous devons préciser quelle « santé » nous défendons. Pierre Roche (2014) s’appuie sur des philosophes (Canguilhem, Nietzsche et Spinoza) pour parler de santé vivante au-delà de la définition de l’OMS de 1946 « un état de bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Cette définition est limitative et peut réduire les actions en santé au travail en se centrant sur l’individu dans un souci de protection et/ou de réparation (ces actions sont qualifiées « d’hygiénistes » par Clot, 2010). Pour P. Roche, la santé se construit dans un processus qui vise à mettre en question les normes prescrites dans un cadre contraint. Or, c’est en se confrontant au réel du travail que l’individu est poussé à la créativité et au développement d’une santé qui se construit dans l’établissement d’une nouvelle normativité (création d’actions pour s’adapter aux contraintes) et non pas dans la passivité et l’acceptation de la norme. Le pouvoir d’agir devient alors un ingrédient central de la santé au travail et c’est ce pouvoir d’agir qui doit être soutenu par l’action managériale. A cette définition, nous rappelons que le travail, outre le « faire » est du « faire ensemble ». Aussi, le processus qui aboutit à une santé vivante se construit (ou se déconstruit) dans le cadre des relations entre les professionnels. La qualité des relations professionnelles devient un élément essentiel de la santé vivante : « C’est dire que la construction de la santé, dans une telle perspective, requiert la construction de rapports sociaux à l’intérieur desquels les individus s’affectent mutuellement d’une façon positive et non négative. » (Roche, 2014, p. 6).

Ainsi, l’action managériale soutenant la santé doit conjointement se préoccuper de la qualité du travail tout en veillant à la qualité des relations et à la communication au sein des équipes.

A ces postulats, nous en rajoutons un dernier : débattre et se disputer collectivement sur le travail ne va pas de soi. Cela demande également du temps et un temps dédié spécifiquement à cette activité. Davezies, nous rappelle ce que l’acte langagier nécessite pour avoir une action positive sur la santé :

« Pour que le conflit se développe sous la forme d’un débat susceptible de produire une évolution positive, il faudrait que le salarié puisse revenir sur son activité afin d‘expliciter les enjeux qui ne sont pas perceptibles à partir de la position du chef, mais sont néanmoins pertinents au regard de son expérience professionnelle. (…) Or, il ne dispose ni des temps, ni des espaces de discussion nécessaires à son élaboration. » (Davezies, 2012, p. 14).

Ce temps et ces espaces de discussion centrés sur « la dispute professionnelle » entre les différents acteurs, dont l’encadrement de proximité, nous les avons mis en place dans le cadre d’une recherche-action. Celle-ci s’est déroulée dans un Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD) d’un centre hospitalier de la Fonction publique Hospitalière.

Cet EHPAD, de 403 lits, est divisé en 11 unités. A notre arrivée, l’encadrement se compose de 6 cadres et 1 cadre supérieure de santé. Notre intervention a également inclus le service de bionettoyage (1 cadre et 2 encadrantes de proximité). Au total, 237 professionnels (dont l’encadrement) et 5 médecins ont participé à l’action.

2 – Les éléments de notre recherche action dans un EHPAD

Les établissements de santé ont connu, ces dernières années, de nombreuses transformations liées aux réformes ministérielles (2002, décret relatif au temps de travail ; 2007, réforme hospitalière avec une tarification de l’activité (T2A) ; 2009, loi Hôpital Patient Santé et Territoires). Ces différentes réformes imposent à l’hôpital une maîtrise des ressources utilisées par les établissements de santé dans un contexte plus général de contingentement fort des dépenses publiques. Cet objectif de baisse de la dépense est régulièrement contrôlé par les tutelles que sont les Agences Régionales de Santé (ARS) et la Haute Autorité de Santé (HAS), entre autres acteurs dits « tutélaires ». Des contrats de retour à l’équilibre sont régulièrement négociés entre ces tutelles et les établissements de santé en difficultés.

Dans un contexte économique difficile, le secteur gérontologique de cet établissement a répondu à l’injonction de l’ARS (Agence Régionale de Santé) en mettant en place un « Plan de retour à l’équilibre budgétaire ». Ainsi, la direction de l’établissement a mis en place des mesures qui ont affecté le personnel. Celui-ci a été réduit de 10 % et, avant notre arrivée, l’organisation du travail et les métiers ont été repensés : redéfinition des tâches, création de métiers : agents de bio nettoyage et agents hôteliers. L’ensemble des métiers de soins a été affecté non seulement par la réduction des effectifs mais aussi par la redéfinition des métiers. Notre accompagnement avait pour objectif de préserver (voire développer) la santé des agents dans un contexte de changements organisationnels et relationnels.

Au démarrage de l’intervention, nous connaissions l’établissement de santé auprès duquel nous avions déployé des actions de sensibilisations sur « les risques psychosociaux et la qualité de vie au travail ». Nous avions accompagné les acteurs (direction, partenaires sociaux et encadrements) dans une évolution de leurs représentations afin qu’ils envisagent la prévention de la qualité du travail au-delà du risque psychosocial (et de la personnification des risques). Nos intentions et nos objectifs visaient à instaurer des processus afin de soutenir l’action des encadrants en santé au travail. Ceux-ci ont pris en considération l’état de la recherche sur les liens entre santé et travail. Aussi, nous sommes partis de postulats issus de la littérature :

- La discussion sur le travail produit de la santé (Davezies, 2012 ; Clot, 2014 ; Roche, 2014).

- La discussion sur le travail demande un apprentissage individuel, collectif et organisationnel (Detchessahar, 2013).

Notre objectif central était de développer des compétences individuelles, collectives et organisationnelles à la discussion du travail. Pour cela, il était nécessaire « d’outiller » les acteurs pour soutenir des disputes professionnelles entre pairs, avec son encadrement et, à un niveau plus politique, au niveau du dialogue social. Plus particulièrement, nous souhaitions permettre l’apprentissage à la discussion sur le travail auprès de ces acteurs centraux que sont les cadres (Sarnin et Debard, 2008). Ces cadres de santé se sentent bien souvent pris « entre le marteau et l’enclume » et il nous est apparu tout au long de l’intervention important de développer ces espaces de discussion et cet apprentissage aussi bien auprès des cadres de santé avec leurs équipes, que les cadres de santé avec leur Direction (Direction, Direction des soins et DRH). Ces changements viennent également affecter la qualité du dialogue social sur le travail. Aussi, nous avons veillé à développer ces mêmes compétences dans des espaces de discussion réunissant les acteurs de terrain, les encadrants, les directions et les partenaires sociaux.

En nous appuyant sur les travaux de Detchessahar (ibid.), nous avons bâti un « écosystème » de la discussion sur le travail. En effet, la discussion sur le travail peut avoir une fonction politique en ce sens où elle introduit dans la chaine de décision des éléments de sagesse, de savoir-faire, de « gros bon sens » (Morin, 2010). Elle induit des recherches collectives de solutions produisant des règles à un niveau local (au niveau de l’équipe), global (stratégie de l’entreprise) et méso (lieu de discussions intermédiaires entre les équipes et les encadrants, mais aussi entre les encadrants et leur direction).

« Il faut avoir un espace de discussion avec la direction parce que le « non » collectif ce n’est pas le même que le « non » individuel ». (cadre de santé lors du dernier comité de pilotage)

L’écosystème de la discussion du travail nécessite une organisation qui vise à dépasser les résistances à discuter du travail et également à s’installer durablement cette discussion dans les organisations. Pour répondre à ces enjeux, nous avons cherché d’une part à impliquer l’ensemble des acteurs dans l’ensemble du processus et, d’autre part, à construire des espaces de discussion à différents niveaux politiques de l’organisation (Sarnin et coll., 2012).

Nous avons ainsi interconnecté 3 espaces de discussion :

1. Un niveau local

Le démarrage de notre intervention a consisté à mettre en place des espaces de discussion entre professionnels d’un même métier. Animés par une intervenante, ces espaces ont permis de recueillir les « objets » de travail en tension. Les professionnels ont mis en discussion, entre eux, leurs préoccupations à réaliser du « bon travail ». Afin de ne pas ancrer des stratégies défensives de métier, nous avons interconnecté ce niveau local avec le niveau méso.

2. Un niveau méso

Les objets en tension dans le travail ont été mis en discussion entre les encadrants et leurs équipes (réunissant plusieurs métiers comme aides-soignants, infirmiers, agents hôteliers). Des solutions concrètes et pragmatiques ont été construites et mises en place dans les équipes avec le soutien de l’encadrement. Ces espaces « mezzo » ont été coanimés par les intervenantes et les encadrants après un temps de préparation et de partages de compétences notamment sur les techniques d’animation, le processus de décision avec les équipes et le cadre relationnel entre les participants.

3. Un niveau global

Notre niveau global a été le lieu où les liens entre la stratégie de l’établissement et les objectifs de l’intervention ont été partagés, complétés, coconstruits. Ces espaces réunissaient les représentants de la direction (dont la directrice), les partenaires sociaux, des professionnels des différents métiers de l’EHPAD, l’encadrement et les acteurs du service médico-social.

L’intervention s’est déroulée sur 18 mois. Nous avons schématisé le processus sachant que des réunions de comité de pilotage (niveau global) sont venus rythmer la démarche à raison d’une séance par trimestre environ.


Figure 1 : Processus de l’ingénierie des espaces de discussion par niveau

3 - Les résultats de l’intervention

Lors de nos séances de travail, des situations diverses de tensions du travail à réguler sont apparues. Ces situations de tensions ont constitué nos « objets de discussion ». Nous l’avons dit : débattre du travail ne va pas de soi. Si l’encadrement est habile à « organiser l’organisation du travail », organiser la « Dispute » autour d’une situation qui fait conflit est moins aisé. Ce sont des compétences de médiation du travail par le travail (à partir de situations réelles) qui sont à développer à partir de l’expérience d’espaces de discussion sur le travail. « L’espace de discussion est le médium à travers lequel se réalise l’ensemble des arrangements, compromis et bricolage que supposent l’incomplétude de la prescription et le caractère irréductiblement erratique de l’activité concrète » (Detchessahar, 2013, p. 59). Plusieurs situations de tension ont été choisies par les équipes et les cadres pour trouver des solutions qui répondent collectivement à la question du « bon travail », facteur du développement de la santé : la gestion des absences (faire revenir un professionnel sur son temps de repos), les soins pédicures pour des personnes âgées avec le risque de blesser et plus particulièrement les diabétiques, la gestion des résidents violents, l’organisation des toilettes avec le souci de l’équité… D’autres thèmes de discussion plus transversaux ont émergé : la coopération entre les métiers, les règles d’écoute et de partage d’informations, l’intégration des nouveaux professionnels, l’organisation du travail entre aides-soignants et agents bionettoyages…

Pour chacun d’entre eux, ont été mises en place des méthodologies d’animation de groupe adaptées aux niveaux de discussion et aux objets discutés.

Pour autant, engager ce processus nous a permis de faire face à la culture organisationnelle sous-jacente de cet établissement. Dans celle-ci un certain nombre de « résistances » à débattre du travail sont apparues :

- Si un compte rendu est fait, il est inutile d’assister à une réunion.

- Si un professionnel d’un grade ou d’un diplôme supérieur parle, ça ne se discute pas.

Or, non seulement la discussion était un enjeu dans notre intervention, mais ces différents signaux d’alerte manifestant une résistance « culturelle » à la discussion nous ont incités à créer une nouvelle méthodologie d’animation de nos comités de pilotage afin d’en faire des espaces d’apprentissage collectif et organisationnel à la discussion. Nous avons choisi de passer par l’expérience et de faire vivre à nos interlocuteurs le débat sur le travail. Pour cala, nous avons mis en scène notre intervention. Et, à l’aide d’un tiers (Philippe Sarnin, Professeur de l’Université Lyon 2), nous avons débattu des tensions liées à notre accompagnement afin de les dénouer et trouver collectivement des solutions pour faire du « bon travail » dans cette intervention. Les effets de cette expérience ont été pérennes. Les réunions instituées se sont modifiées en intégrant un espace de débat hors ordre du jour.

« Notre cadre, elle prend le temps de s’asseoir avec nous. Elle ne pose pas le planning et elle part. Elle est à l’écoute. Dès qu’on pose un problème, elle cherche à nous arranger. Lorsqu’il y a un problème, elle fait une réunion et elle demande l’avis de tous. Après, elle décide et c’est en fonction du confort du résident. » (propos d’une professionnelle)

En termes d’apprentissage, nous restituons les propos de la directrice des soins lors d’un comité de pilotage :

« Ce que j’ai trouvé intéressant dans les retours, c’est que les agents évoquent ce besoin de communiquer, d’échanger entre eux. Alors je me dis que cette réorganisation, le projet la brossait dans les grandes lignes et orientations. Inévitablement, il y avait des points qui allaient heurter et dysfonctionner, et l’idée c’est de rendre les professionnels acteurs et c’est aussi notre principale préoccupation. Finalement, ces points de dysfonctionnements, c’est l’outil à utiliser pour faire parler autour de leurs préoccupations, mais du quotidien, ce qui leur pose vraiment un problème, de situations où ils ont eu des difficultés. OK, ça s’est passé comme ça. On va voir comment le résoudre autour de la table et ça se fait en inter-métiers. C’est l’essence même de ce projet. Moi ce que j’ai entendu, c’est que les agents veulent discuter entre eux. Il y a des tensions et des choses à revoir. Et c’est un véritable outil de management pour l’encadrement me semble-t-il. » (Extrait comité de pilotage)

Cet extrait représente ce que nous avons pu observer dans les espaces de discussion, et ce à tous les niveaux, c’est-à-dire des postures et des mises en débat différentes qui permettent d’échanger sur autre chose que les objectifs, soit sur le réel du travail. Dans cet extrait, nous pouvons également observer un « déplacement » du regard :

« Par rapport à ce que vous disiez tout à l’heure sur les métiers… Le métier, il est le métier. Mais il se décline de façon très différente suivant où on est. Et ça vous l’avez très bien perçu. Et ça moi, j’en suis convaincue parce que rien qu’au niveau de mon site, il y a trois étages. Je suis aide-soignante et mon travail, je le fais de la même façon, mais j’ai une façon de faire différente en fonction des étages. Je suis aide-soignante sur mon site mais je ne suis pas la même au premier au deuxième, etc. » (Propos d’une aide-soignante et membre du CHSCT)

Pour permettre cette différence de mode d’échanges, et parvenir à des changements de postures individuelles et collectives, une attention forte a été portée sur la qualité des relations entre les intervenantes et les professionnels, la convivialité des rencontres et les règles de fonctionnement.

Nous avons veillé à faire de nos interventions des moments agréables et engageants : recevoir les groupes avec des boissons, prévoir des moyens pour se restaurer selon les horaires de nos interventions, aider à préciser les sujets sensibles, être en somme attentives, voire attentionnées. Nous sommes allées sur le terrain au démarrage de l’action pour accompagner les agents et mieux comprendre le travail et le métier. Développer une confiance entre les intervenantes et les groupes de travail a conduit progressivement à la possibilité de sortir des habitudes de fonctionnement, pour oser dire ou faire ce qui n’était pas dans les « codes » antérieurs (manière d’animer, ce qui est convenu de dire ou pas…). Ainsi un cadre qui était en retrait dans les coanimations avec ses équipes est progressivement devenu plus actif, voire co-créatif dans la manière de débattre sur le travail avec ses équipes. Non satisfait de l’engagement de ses équipes lors d’une séance de travail, il a souhaité, lors de la séance suivante, animer l’espace de débat avec une méthodologie plus exposante : « jouer » des scènes de vie au travail sur un des sujets en tension (faire revenir un agent pendant ses jours de congés pour assurer la continuité de service). Ceci a représenté un engagement fort, pour lui, pour les membres de son équipe, pour l’intervenante. Mais cette séance a été particulièrement intéressante. Des situations problèmes indicibles et invisibles jusqu’alors ont pu être évoquées avec le cadre et être débattu sur les solutions possibles. C’est un exemple de ce qui a été possible après un travail individuel et collectif de plusieurs mois avec les cadres de santé et leurs équipes.

Cette création « d’alliances » (à tous les niveaux, avec les métiers, binôme intervenante-cadre, au niveau global) semble aussi avoir contribué au renfort de la confiance, de l’espoir pour consolider et étayer ces transitions. Nous avons vu aussi l’équipe des cadres passer d’une posture collectivement observatrice (peu d’interventions au début des séances qui leur étaient destinées), à une posture engagée et proactive (faire des demandes, être plus sollicitant auprès de leur hiérarchie, voire auprès des intervenantes pour demander des séances spécifiques pour leurs métiers).

Notre deuxième hypothèse établissait un lien positif entre l’apprentissage collectif à la discussion et la santé des équipes (encadrement compris). Nous nous sommes donc questionnés : qu’est-ce qu’ont produit les espaces de discussion en termes de santé ?

4 – Evaluation de l’action

Dès le début, nous avions prévu d’évaluer l’action en termes d’impacts sur la santé. Aussi, nous avions proposé un questionnaire qualité de vie aux 240 professionnels de cet EHPAD au démarrage de l’intervention. Nous avons proposé le même questionnaire 18 mois après, avec un taux de retour similaire d’environ 60 %. Les résultats ci-dessous montrent l’évolution de la satisfaction des professionnels sur les items mesurant la santé :

Avant intervention

Après intervention

La possibilité de prendre des décisions de ma propre initiative dans le cadre de mes fonctions

36 %

47 %

La créativité dans la réalisation de mon travail

16 %

37 %

La façon dont mon travail est respecté

16 %

32 %

L’ambiance de travail dans mon service

47 %

67 %

Mes relations avec les personnes avec qui je travaille

56 %

70 %

Les temps d’échange sur le travail avec mes collègues

29 %

40 %

La manière dont mon hiérarchique prend en compte les propositions de l’équipe

21 %

44 %

La manière dont mon hiérarchique anime et motive son équipe

18 %

40 %

Le soutien au quotidien reçu de la part de ma hiérarchie en cas de difficulté

21 %

40 %

Mon supérieur prend en compte mon opinion

11 %

30 %

L’aide que je peux apporter aux patients

38 %

51 %

Tableau 2 : Résultats du questionnaire de satisfaction

Observer ce tableau et ces résultats pourrait laisser l’impression d’une vision idyllique de cette recherche-action. Pour autant, nous avons pu constater, au-delà du temps que demandent ces interventions, plusieurs limites.

Premièrement, l’apprentissage à la discussion et la mise en place d’espace de discussion n’est pas toujours possible dans des contextes de tensions relationnelles graves dans une équipe. Une action visant l’apaisement des conflits ou l’arbitrage des conflits est nécessaire dans un premier temps. En revanche, pour accompagner les équipes à retrouver des modes de coopération, choisir des objets de discussion centrés sur le travail permet de revenir à des modes relationnels plus sains.

Deuxièmement, le turn-over structurel des cadres dans la Fonction Publique Hospitalière interroge la pérennité des effets de cette intervention. Moins de deux ans après notre intervention, seuls 2 cadres sur les 9 que nous avons accompagnés sont toujours présents auprès des équipes. Qu’ont-ils transmis à leurs nouveaux collègues ? Comment la Direction des soins et la cadre supérieure ont-elles pu transmettre cette « culture » du débat auprès des nouveaux cadres de santé ? Cette nouvelle compétence a-t-elle été recherchée dans les recrutements et développée ? Autant de questions qui restent en suspens et qui pourraient être l’objet d’une nouvelle évaluation.

Nous avons aussi constaté que l'apprentissage à la discussion est long aussi bien pour les individus que le collectif de travail, mais aussi pour les acteurs institutionnels. Nous sommes même en droit de poser la question suivante : en finit-ont un jour d’apprendre à discuter du travail et à se disputer professionnellement ?

Conclusion

L’évaluation de notre intervention menée dans la partie 4 démontre que « manager par la discussion » produit des effets positifs sur la santé en termes de développement du pouvoir d’agir. Toutefois, nous devons convenir que des compétences doivent être acquises par les encadrants.

Nous pensons que cet « art » comprend, de notre point de vue, trois types de connaissances :

- La connaissance des processus : parler de son métier demande un apprentissage à la discussion. L’encadrant doit prendre en compte la temporalité que demande tout apprentissage. Il est variable selon la vitalité du collectif de travail.

- La connaissance d’outils pour interroger le métier : bien que l’objectif de la discussion soit une prise de décision ou un objectif de production de solutions concrètes, c’est la capacité du cadre à mettre en interrogation les évidences du métier de ses équipes qui permet de transformer le travail. Acquérir des techniques d’animation, faire respecter un cadre relationnel et arbitrer sont des outils nécessaires pour interroger le métier en sécurité.

- La connaissance du… reste. Nous voudrions citer cette scène entre deux encadrants l’un confirmé et l’autre novice. Le premier apprenait au deuxième à faire des plannings lorsqu’il a poussé la feuille vers son collègue en lui disant : « Et le reste t’appartient ». Le reste appartient au cadre. Pour connaitre ce « reste », il lui faut s’intéresser à ses équipes, connaître les rituels, saisir les subtilités relationnelles.

C’est « l’art d’interroger le métier » qui doit être construit avec les encadrants.

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